Les plantes des champs : une biodiversité ignorée

Champ de coquelicots

Le terme « messicole » désigne étymologiquement les plantes « habitantes des moissons ». Ces plantes possèdent la particularité de se développer uniquement ou préférentielle dans les cultures. Le travail du sol régulier leur est nécessaire pour se maintenir, ramener les graines en surface et provoquer la germination.

Les messicoles appartiennent au groupe des adventices, qui désigne l’ensemble des plantes poussant dans une culture sans y avoir été semées, aussi couramment appelées « mauvaises herbes ». Cependant les plantes messicoles constituent un groupe restreint d’espèces dépendantes de certaines pratiques agricoles et ne parvenant que difficilement à se maintenir dans d’autres conditions, ce qui fait leur particularité.

Des origines bien lointaines

Dans leur pays d’origine les messicoles sont des plantes pionnières qui colonisent des milieux ouverts (steppes, pelouses arides du Moyen-Orient et d’Asie mineure). L’apparition des cultures au néolithique a favorisé leur développement et leur maintien dans ces milieux. D’abord limitées aux secteurs tropicaux et équatoriaux, les espèces se répandent Europe en suivant le réchauffement progressif des régions nordiques (dites aujourd’hui tempérées).

Diversité et répartition en France

Les cortèges messicoles suivent la répartition générale de la richesse biologique et sont plus diversifiés dans les régions sud qu’au nord du pays. Outre l’abondance de soleil et un temps hivernal moins rigoureux, les départements méridionaux offrent plus de surfaces de sols oligotrophe, et les milieux naturels et semi-naturels y sont relativement moins dégradés qu’au nord. La liste nationale comporte 102 taxons et la liste d’Aquitaine (rédigée avant la fusion) comporte 106 taxons, dont 10 sont considérés disparus en région (cotation « RE » sur liste rouge UICN). A titre de comparaison, 92 taxons sont considérés comme messicoles en Hauts de France, mais 19 d’entre eux, soit plus de 20% du cortège sont d’ores et déjà disparus à l’échelle régionale.

Place dans l’écosystème

L’intérêt des messicoles comme support pour la faune a été assez bien étudié : de nombreuses plantes des champs sont nectarifères et pollinifères et offrent une source de nourriture importante à l’entomofaune. Elles favorisent ainsi indirectement la pollinisation des plantes cultivées au sein d’un système vertueux.

Par ailleurs, les graines des plantes constituent une source de nourriture pour les cortèges d’oiseaux, qui consomment également les insectes attirés par le nectar. Des cultures traditionnelles, biologiques situées au sein d’une patrice paysagère diversifiée constituent le support d’écosystèmes riches, aujourd’hui rares et menacés, loin de l’imagine négative que les monocultures modernes évoquent aujourd’hui.

Usages

Comme la plupart des autres végétaux, les messicoles sont utilisées dans de nombreux domaines comme la pharmacologie (propriétés des plantes utiles dans la fabrication de nombreux médicaments) ou encore l’alimentation (graines de pavot utilisées couramment en boulangerie). Ces espèces sont également utilisées dans le domaine de la cosmétique (crèmes, eaux florales, huiles végétales).

Menaces et conservation

Habitantes des champs et moissons, les plantes messicoles sont l’un des groupes vivants les plus impactés par les méthodes de culture moderne. Une grande part des pratiques actuelles leur sont défavorables (fertilisants et intrants chimiques), lorsqu’elles ne les détruisent pas totalement (biocides). Dans les départements de plaine agricole surtout situés dans la moitié nord de la France, les cortèges de messicoles se sont effondrés et de nombreuses espèces, parmi les plus rares et fragiles, ne sont plus revues. Les cultures, talus et bords de chemins sont même dépourvus des espèces les plus communes comme coquelicots ou les bleuets.

Les messicoles se maintiennent mieux dans la moitié sud qui offre encore de grandes surfaces de terres calcaires et pauvres en nutriments qui regroupent les conditions optimales pour le développement de la flore messicole (secteurs montagnards et alpins, causses et plateaux méditerranéens et subméditerranéens…).

La marge d’action principale concerne le secteur agricole et les réseaux publics et associatifs de protection de la nature. Cependant et malgré la situation alarmante, la mise en place de pratiques vertueuses à l’échelle individuelle favorise la résilience des cortèges messicoles :

  • Proscrire toute utilisation de biocide, Roundup ou engrais chimique dans son jardin, son potager ou dans les espaces verts de sa commune ;
  • Pour les propriétaires de terrains agricoles, garder sans usages des friches ou jachères culturales. Mieux encore, y semer des mélanges de graines messicoles indigènes et locales: ces graines proviendront en premier lieu de prélèvements autour de chez vous. D’autre part, de plus en plus d’initiatives visent à cultiver et sauvegarder des espèces messicoles locales. Ces structures assurent parfois des ventes/distributions de graines. L’une des plus connues est mise en œuvre par le conservatoire de La Morelière à Saint-Laurent-de-Lin (37) ;
  • Semer ces graines dans son jardin sur des espaces de terre nue ;
  • Orienter son mode de consommation alimentaire et favoriser les exploitations et filières biologiques, locales, dites raisonnées et/ou respectueuses de l’environnement ;

Pour plus d’information sur les actions menées en faveur des plantes messicoles, vous pouvez consulter les sites suivants :

Article: Guillaume D’Hier

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