Qu’est-ce qu’une galle ?
Les galles, ou cécidies, se présentent comme des déformations d’une plante ou d’un champignon provoquées par un autre organisme. Ce dernier peut être une bactérie – on parle alors de bactériocécidie –, un champignon – mycocécidie –, mais le plus souvent un acarien – acarocécidie – ou un insecte – entomocécidie – dans les cas qui nous intéressent le plus aujourd’hui.
Ces acariens et insectes dits « galligènes » ou « cécidogènes » provoquent, en piquant la plante, une réaction physiologique complexe qui se traduit par une déformation structurée des tissus végétaux présentant une forme et une taille très constantes et caractéristiques de l’organisme galligène : un même organisme provoquera toujours le même type de galle sur sa plante hôte. Ces déformations, très communes dans la nature, intéresse le naturaliste car elles se situent, par les organismes impliqués, à l’interface entre la botanique et l’entomologie.
Quelques galles communes
La plus commune et la plus connue des galles de nos régions est sans doute le bédégar, aussi nommé barbe de Sain-Pierre, cette galle chevelue qui ne passe pas inaperçue sur les rosiers sauvages (Rosa sp.). Le responsable de cette étonnante déformation est une petite guêpe, de la famille des Cynipidés, nommée Diplolepis rosae. Certains prêtent à cette galle des propriétés thérapeutiques, notamment visant à lutter contre les diarrhées. D’autres proposent de glisser quelques exemplaires secs de cette galle sous les oreillers des enfants au sommeil agité… Notons que le nom « bédégar », très ancien et emprunté à l’arabo-persan badaward, était déjà cité par Linné lorsqu’il a décrit Cynips rosae – aujourd’hui Diplolepis rosae – et désignait jadis tous les rosiers sauvages.

Au printemps, vous avez peut-être observé, au sol ou sur des chênes, de petites boules vertes évoquant des raisons ou des groseilles à maquereaux. Si vous coupez délicatement en deux l’une de ces boules, vous verrez une loge centrale contenant la larve d’une autre minuscule guêpe Cynipidés, Neuroterus quercusbaccarum. Ce qui est surprenant est que le même insecte provoque, cette fois en été et sur les mêmes hôtes, des galles bien différentes, en forme de lentilles, crème et hérissées de nombreux poils roux disposés en lignes concentriques. Comment la même espèce peut-elle produire deux galles totalement dissemblables ?
Cela s’explique par l’alternance de générations chez cet insecte : au printemps, ce sont des femelles parthénogénétiques – qui se multiplient, donc, sans reproduction sexuée – qui pondent sur les jeunes feuilles ou les inflorescences des chênes. Les œufs produits vont éclore et produire soit un mâle, soit une femelle, d’une nouvelle génération, sexuée cette fois. Les femelles de cette génération vont pondre sur le revers des feuilles de chêne et conduire à la formation des galles lenticulaires. En automne, ces galles tombent au sol et la maturation des larves se poursuit dans la litière : les adultes parthénogénétiques en émergent à la fin de l’hiver… et le cycle est bouclé.
Bien d’autres galles peuvent être observées sur les chênes. Citons par exemple la grosse galle « en pomme » de Biorrhiza pallida, cette fois encore produite par la génération pathénogénétique d’une guêpe Cynipidés – la génération sexuée produit des galles souterraines sur les jeunes racines. Coupée en deux, cette galle révèle les nombreuses loges larvaires de la guêpe. Notons que cette galle, très riche en tanins, peut être utilisée pour teindre les fibres textiles et produire, selon le mordant utilisé, de beaux bruns et des noirs.

Citons également, toujours sur chêne, l’élégante galle « en artichaut » apparaissant à la place des bourgeons et provoquée par la guêpe Andricus fecundatrix, ou encore les petites galles « en clous », très communes à la surface des feuilles du Tilleul à grandes feuilles (Tilia platyphyllos), et dues cette fois à un acarien, Eriophyes tiliae.
Mais nombre de galles se développent également sur des plantes herbacées, comme celle provoquée sur l’Euphorbe petit-cyprès (Euphorbia cyparissias), cette fois par un diptère nommé Bayeria capitigena : le bourgeon terminal grossit, prend des teintes rouges à rosâtres, et contient de nombreuses larves orangées.

Si cette courte introduction à la « cécidologie » vous a donné envie d’en savoir plus, voici quelques pistes bibliographiques:
- P. Dauphin, 2012. Guide des galles de France et d’Europe. Éditions Belin, 240 p.
- Dauphin et J.-C. Aniotsbéhère. 1997. Les galles de France. Mémoires de la Société linnéenne de Bordeaux, 382 p.
- Girard. 2019. Spécial galles (cécidies). Numéro spécial (n° 232) du Bulletin mycologique et botanique Dauphiné-Savoie, p. 1-94.
Article et photos: Guillaume Eyssartier





