La saison de reproduction des batraciens a commencé !

Crapauds épineux en amplexus

Quelle idée ! Alors que l’hiver perdure, les amphibiens décident que c’est le bon moment pour se reproduire ! A la faveur d’un redoux, d’une tendance marquée vers un printemps qui s’annonce que eux seuls ressentent, tous ce petit monde se réveille et décide de rejoindre les mares et autres étangs pour se reproduire.

Chez les batraciens on distingue deux grandes familles :

  • Les Anoures perdent leur queue une fois adultes ( Grenouilles, Crapauds…)
  • les Urodèles, conservent leur queue à l’état adulte ( Tritons, Salamandres…)

Intéressons cette fois-ci nous aux Anoures, ces amphibiens sans queue et qui vont faire parler d’eux en cet fin d’hiver !

Les grenouilles dites « brunes » en première ligne avec les Crapauds épineux

Les premières espèces à ouvrir le bal de la reproduction dans notre région sont les Grenouilles rousses dans la famille des grenouilles brunes, vous suivez? En dordogne elle accompagne la Grenouille agile qui elle pond un peu plus tard mais la période se croise en février mars.

Dés le mois de janvier  la reproduction a déjà commencé chez la Grenouille rousse et des pontes sont observables dans les pièces d’eau. Chez les grenouilles les pontes sont toujours en amas. Pour différencier une ponte de grenouille rousse de celle d’une grenouille Agile, ce n’est pas évident et il faut se garder de toute certitude surtout. Une ponte très précoce en janvier est plutôt synonyme d’une rousse mais avec le changement climatique? qui sait. Sinon généralement la ponte de la grenouille rousse « flotte » alors que celle de l’Agile est plus immergée !

 

Grenouille agile

Grenouille rousse

Museau pointu Museau plutôt arrondi
Peau lisse Peau plutôt verruqueuse
Plis dorsaux parallèles Plis dorsaux convergents au milieu
Iris avec une barre sombre sur le bas Iris uniformément clair
Liseré doré absent ou étroit autour de la pupille Liseré plutôt doré épais autour de la pupille
Ventre blanc crème, jaunâtre ou rosé généralement uniforme* Ventre blanc crème, + ou – taché ou marbré de noirâtre ou jaunâtre ou rougeâtre*

 

*ce dernier critères vous impose de manipuler les individus, ce qui est interdit sans autorisation préalable

Il faut additionner certains de ces critères pour être certain de l’espèce. Sinon, vous avez un petit comparatif fait par Deux-Sèvres environnement ci-dessous

https://cdnfiles1.biolovision.net/www.nature79.org/userfiles/COINnaturaliste/herpeto/temporariaVSdalmatinaadultesDSNE.pdf


Oui nous parlons bien de migration de crapauds et autres grenouilles. Cette migration de fin d’hiver s’appelle la migration prénuptiale (avant la reproduction). Les amphibiens ont passé l’hiver réfugiés au fond de la vase ou enfouis dans l’humus de la forêt, au fond de trous ou des cavités de micromammifères, sous des souches et bien d’autres lieux à l’abri du gel. Le voyage est donc sur de courtes distances et très localisé aux pièces d’eau.

Le cas des crapauds épineux

Comme le démontre l’opération que suit Nature en Périgord sur une route départementale, la sortie de l’hibernation peut-être brutale. Surtout chez les crapauds épineux ou communs. On observe de véritables rushs printaniers, cad que le grand nombre d’individus se ruent dans les pièces d’eau qui les ont vu souvent naitre pour se reproduire. ET cela peut être très localisé et engendrer de grosses pertes si une route vient barrer cet axe de migration. Pour exemple depuis le 31 janvier  2022 environ 150 individus ont été capturés et relâchés.

La migration pré-nuptiale et l’accouplement

Arrivées à la mare, les femelles, et plus particulièrement les plus grosses, sont assaillies par plusieurs mâles. Ces assauts forment des boules de crapauds mouvantes et bruyantes. Au cœur de ces orgies sexuelles, les femelles ne peuvent se libérer de tous ces mâles excités. Certaines, ne pouvant plus respirer, y laisseront la vie.

Le mâle est donc agrippé sur le dos de la femelle, il l’enserre  sous les aisselles avec ses pattes, plantant ses poings dans les flancs de cette dernière. Des callosités nuptiales noires et rugueuses développées sur la face interne de ses doigts l’empêchent de glisser.

Les callosités noires permettent d’identifier les mâles ici des femelles 2 mâles sur une femelle

La ponte chez le crapaud épineux

La ponte a lieu dans l’eau. Le mâle accroché à la femelle va éjecter son sperme sur les ovules à leur sortie. Chez le crapaud, la ponte est facilement reconnaissable car elle se constitue de deux chapelets d’œufs entrelacés dans les racines des arbres situés en bord d’étang ( souvent du saule, de l’aulne…)

Le voyage retour

Après avoir pondu la femelle repart quasiment aussitôt de l’étang ou de la mare pour éviter de subir les assauts des mâles. Lors d’une opération de sauvetage on remarque facilement les femelles ayant pondu par la peau de leur ventre très distendue !

Une fois la saison de reproduction passée les individus vont rester non loin de zones humides ou des boisements.

Les œufs fécondés vont donner lieu à de petits têtards de couleur noire au bout d’environ 15 jours. La transformation du têtard en petit crapelet intervient entre deux et trois mois plus tard. Les crapelets nombreux se dispersent lors de conditions favorables ( pluie et douceur) dans l’environnement proche…Ce n’est qu’au bout de deux ou 3 ans que les individus sont matures sexuellement. A noter que l’espérance de vie d’un crapaud est tout de même d’environ 12 à 15 ans en milieu naturel.

Un autre petit crapaud : l’Alyte accoucheur

Qui n’a pas entendu ce petit chant au printemps ou l’été le soir en bord de terrasse, surtout après une pluie salvatrice…? J’aime bien l’entendre et pour s’endormir c’est l’idéal…

L’Alyte accoucheur est un petit crapaud (3.5 à 5 cm) avec pupilles verticales (contrairement au Crapaud épineux, elles sont horizontales) plus ou moins en losange, museau court ou arrondi.

Les mâles chantent depuis leur cachette ou à proximité car, à la différence des autres anoures de notre pays, les adultes ne se regroupent pas dans un point d’eau pour la reproduction. Ce sont ces chants qui permettent aux femelles de localiser les mâles reproducteurs. Autre originalité, son mode de reproduction. Alors que la plupart des amphibiens s’accouplent dans l’eau, lui s’accouple au sec, sur la terre ferme, généralement entre mars et septembre. Après l’accouplement, le mâle récupère les œufs fécondés et les fixe sur ses pattes arrière. Il les gardera ainsi tout au long de leur développement pendant plusieurs semaines et il les transporte sur son dos jusqu’ à l’éclosion.

Durant cette période, le mâle fréquente les milieux chauds et humides, caché entre les pierres ou un tas de sable et il ira régulièrement tremper les œufs dans l’eau pour les hydrater. Juste avant l’éclosion, les œufs seront déposés dans un point d’eau où les têtards pourront éclore et se développer. Ce mode de reproduction lui vaut son nom donc le nom de crapaud « accoucheur ».

Les grenouilles vertes

Il existe de nombreuses espèces difficiles à différencier de prime à bord. La Grenouille rieuse, de Lessona, de Graf, de Perez…on parle souvent du complexe des grenouilles vertes. Elles ne sont d’ailleurs pas si verte que ça, les Rainettes le sont davantage !

En tous les cas, les grenouilles vertes font sans aucun doute partie des batraciens les plus souvent observés et les mieux connus du grand public. Au printemps et en été, leur chant retentit aux abords des points d’eau, de jour comme de nuit. Cela peut d’ailleurs amener des conflits d’usage entre voisins ( voir la lare aux grenouilles de Grignols en Dordogne).

Durant la journée, les grenouilles vertes se chauffent au soleil sur la berge, d’où elles peuvent sauter dans l’eau pour se réfugier en cas de danger. Cela vous est sûrement déjà arrivés en arrivant à proximité d’une mare.

Ces grenouilles se mélangent génétiquement et forment des hybrides féconds. Les grenouilles vertes ont une peau le plus souvent vert brillant, plus rarement jaune-vert ou bleu-vert, parfois même brunâtre. Le dos et les flancs sont parsemés de taches foncées, qui se rejoignent sur les cuisses pour former des raies. Le milieu du dos est souvent orné d’une ligne longitudinale vert clair. Il faut un très bon guide consacré à l’identification de ces espèces qui met en avant certains critères distinctifs.

 

La ponte

La ponte est beaucoup plus tardive que les autres espèces de grenouilles. Leur activité commence en mars où les mâles se font entendre mais la reproduction est en avril ou mai. Là aussi la ponte se constitue en amas d’œufs dans les mares et eaux stagnantes. La Grenouille vert chantera ainsi tout l’été.


Les Rainettes

Les rainettes ne sont pas parie de la famille des grenouilles. Elles s’en différencient par la présence au bout de leurs doigts de disques adhésifs, leur permettant de grimper dans la végétation. On dit rainettes arboricoles qui ne vont dans les points d’eau que pour s’y reproduire. En dordogne nous pouvons rencontrer la Rainette verte et la Rainette méridionale.

Le critère principal  est l’observation du flanc de la Rainette. Une bande sombre parcours le corps de la Rainette verte, depuis l’oeil jusqu’au flanc, tandis que cette bande s’arrête au début du flanc, au niveau des pattes chez la Rainette méridionale.

La Rainette méridionale se trouve principalement dans le sud du département (point jaune)

extrait atlas des amphibiens ( Cistude Nature)

Un autre critère : le chant

Le chant de la Rainette méridionale est plus lent que celui de la Rainette verte, elle prend son temps comme on dit, c’est normal étant une espèce méditerranéenne !

La Rainette méridionale ( source MNHN)

La Rainette verte (source MNHN)

 

Le petit monde des batraciens est passionnant. Les amphibiens sont liés aux milieux humides (mares, fossés, ruisseaux, étangs, marais, etc) où ils naissent, grandissent et retournent chaque année au printemps pour se reproduire. Mais le reste de l’année, la grande majorité d’entre eux se rencontre sur terre,  dans les forêts, les berges des cours d’eau ou les jardins.

Vous pouvez les accueillir chez vous par l’installation d’une mare, d’un bassin, même de faible superficie. Sa réalisation n’est pas très compliquée et pas très couteuse. Ensuite place à l’observation de tout le petit monde de la mare !

Texte et photos : Sylvain WAGNER

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